Ms233 (Orthez)

J’ai mal me disais-tu… (1899)

Manuscrit autographe (2 ff. ; dim : 15,5 x 20), signé, daté de juin 1899. Encre et crayon. Incomplet : il manque la première partie. Acquisition Joassin. Première publication dans OPC, 1995, t. II, p. 583. Reprise dans OPC (2006), p. 1380.

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J’AI MAL ME DISAIS-TU…

II

− J’ai mal, me disais-tu. Et je t’interrogeais.
− Ce n’est rien, disais-tu, c’était un mot en l’air…

Dimanche, j’étais seule et je t’ai regretté.
− Dimanche, je croyais ne t’avoir pas quittée.

Tu me disais : la rose est ma fleur préférée.
Je répondais : jadis, c’était la violette…

Combien, ô mon amie, cette nuit, de baisers ?
− Ô amour, tu sais bien qu’il ne faut plus compter.

− As-tu vu repasser ce jeune homme qui t’aime ?
− Ami, ne parle plus de lui, je le déteste.

III

Pour qui sont aujourd’hui ces mots d’amour subtils ?
− Amour, lui disais-tu. − Amour, répondait-il.

− L’Hiver finit, dit-il. Tu dis : C’est le Printemps.
− Je t’aime, te dit-il. Tu dis : répète… encore…

− Dimanche, lui dis-tu, je ne t’ai pas quitté.
− Dimanche, j’étais seul et je t’ai regrettée.

− Combien, ô mon ami, cette nuit, de baisers ?
− Ô amie, se peut-il que tu n’aies pas compté ?

− As-tu vu repasser celui que tu détestes ?
− Ami, ne parle plus de lui. C’est toi que j’aime.

 

L’hypothèse est séduisante (posée par Michel Haurie) qui fait de ces vingt vers (deux strophes numérotées II et III) la suite de l’« Élégie quatorzième », au demeurant plus brève que les seize autres Élégies. L’esprit et la composition (cinq strophes de deux vers) de cette pièce rappelle indiscutablement cette « Élégie quatorzième » :

 

ÉLÉGIE QUATORZIÈME

− Mon amour, disais-tu. Mon amour, répondais-je.
− Il neige, disais-tu. Je répondais : Il neige.

− Encore, disais-tu. Encore, répondais-je.
− Comme ça, disais-tu. Comme ça, te disais-je.

Plus tard, tu dis : Je t’aime. Et moi : Moi, plus encore…
− Le bel Été finit, me dis-tu. – C’est l’Automne,

répondis-je. Et nos mots n’étaient plus si pareils.
Un jour enfin tu dis : Ô ami, que je t’aime…

(C’était par un déclin pompeux du vaste Automne).
Et je te répondis : Répète-moi… encore…/p>