Ms 149 (Orthez)

Ms149 - L’Auberge des poètes (1912)

Manuscrit autographe (9 ff. ; dim : 30,5 x 20), non signé, que l’on peut dater de 1912 ou plutôt 1913. Don Mengus. Il s’agit d’une version de ce qui deviendra « L’Auberge des Poètes ». Mais cette version est très différente du texte définitif.

Dans le Ms 149, les personnages du conte sont le vieux poète, l’aubergiste, la mère morte, une voix (celle d’une « vieille amie de Dieu ») et la cloche des clarines qui sonne l’aube en même temps qu’elle annonce le mariage des âmes avec Dieu.

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Dans la version publiée, en lieu et place de la mère morte, de la voix et de la cloche, Jammes a fait entrer en scène l’Ombre de trois fabulistes : Ésope, Babrius et Jean de La Fontaine. Le conte a donc été nettement laïcisé. Et il s’est transformé en fable. Jammes s’y portraiture en vieux poète confronté au pharisaïsme d’aubergistes à qui il a demandé, contre un franc, le gîte et le couvert. Ce qui caractérise les deux « fripe-sauce », c’est la haine de la poésie.

Jammes l’a bien connue, cette haine, et a bien dû chercher à s’en défendre, comme fait d’abord son vieux routier : « Excusez-moi. J’ai pris l’habitude de la poésie. » Mais aux excuses vont succéder la farce et le rire. Dans « L’Auberge des poètes », sous l’ombre tutélaire de trois grands connaisseurs des « rouages de la vieille mécanique du monde », Jammes s’est fait fabuliste :

Quelle joie d’assister à une fête de l’esprit et quel honneur d’appartenir, oh !
bien humblement, à une corporation si habile à manier le caractère humain
et à tailler dedans un sonnet ou une fable, comme un savetier un soulier dans du cuir !

(p. 153)

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« L’Auberge des Poètes » sera dédiée à Robert Vallery-Radot. C’est, après « L’Auberge des douleurs » et  « L’Auberge sur la route », la troisième « Auberge » d’une série qui trouvera sa place dans Feuilles dans le Vent, au Mercure de France, en 1914 (pp. 141-156).

Dans « L’Auberge des poètes », Francis Jammes sourit, mais d’un « ris sardonien », comme on disait au XVIème siècle. Il rappelle une fois de plus le mépris dont les poètes font presque toujours l’objet chez les philistins et les mercantis. Lui-même, faut-il le rappeler, a expérimenté cet ostracisme et souffert de la bêtise ... « à front de taureau ».