Ms 450 (Pau)

Grotesques (1925)

Manuscrit autographe, signé et daté. Inséré dans une chemise grise, il comporte 3 ff. in 4 précédés d’un titre portant en bas la signature et l’adresse de Francis Jammes à Hasparren, Basses-Pyrénées.

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L’histoire de ce manuscrit peut être reconstituée.

Avant que Jean Labbé ne l’acquière au début d’octobre 1953, chez Saffroy, il avait été acheté, le 25 mars 1939, par Jean de Codestieux, l’auteur de Cœurs en solde : étude de mœurs contemporaines (Éditions Self) et de Vérités : Pensées satiriques, publié à Paris, chez René Debresse en 1939 (Préface de Gérard de Lacaze-Duthiers). Jean de Codestieux a pourvu le manuscrit d’une couverture mauve annonçant, à l’encre violette, le nom de l’auteur, le titre et la date du poème.

Il l’a surtout orné d’un beau portrait de sa composition et y a adjoint un article de presse (du 5 novembre 1938) annonçant la mort du poète ainsi que le commentaire suivant : « Beau poème d’un ton particulier dans l’œuvre de Francis Jammes, et qui est une longue raillerie sur le spectacle de la plage de Biarritz et sa foule de snobs plus ou moins ridicules. » Sous ce commentaire, Jean de Cordestieux a recopié les premiers vers du poème :

Par tout cet océan qui n’a pour Néréïdes
qu’un grouillement de chair vautrée au sable humide,
Et dont les demi-dieux, aux caleçons rayés,
Sont des zèbres humains dont les poils sont noyés
Etc…..

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Le poème, en vagues amères, raille cruellement Biarritz. « Effroyable est l’ennui » qui y règne. Tout y « attriste » et « dégoûte » le poète : les baigneuses (pas vraiment des filles de Nérée) et les baigneurs (« des zèbres humains » dans leurs caleçons rayés) ; les mondains et les demi-mondaines ; les cottages aux couleurs « de nougat » et aux noms mirlitonesques. In extremis, cependant, au bout de sa déambulation biarrotte et d’un tunnel d’ailleurs bien réel, Jammes voit le Rocher de la Vierge, le Jaizkibel et l’Espagne. Cette vue rend enfin au promeneur son « âme fraîche », quoiqu’elle lui rappelle aussi son « jeune âge amer ». L’apaisement vient de ce que le père pense à ses deux filles pensionnaires des Dames de Saint-Maur à Fontarabie, chez la cousine Élisa Jammes (Sœur Saint-Octave en religion).

Huit ans plus tard, en 1933, l’auteur de Pipe, chien, emboîtant le pas d’un chien de cirque en fugue, épinglera de nouveau Biarritz, « l’une des plus belles plages de France »… sur la bien nommée « Côte d’argent ».

Le poème a d’abord été publié dans Le Manuscrit autographe, n° 2, en mars-avril 1926, avant d’être repris dans l’Œuvre poétique complète (OPC) de 2006 (pp. 1469-1470).

 

Jacques Le Gall