Manuscrit autographe (1 f. ; dim : 43 x 22), non daté, signé. Encre. Acquis chez Jean Loize, l’érudit libraire de la rue Bonaparte, à la fin de l’hiver 1948-1949
Sous le titre « Sommeil », ce couple de poèmes figurait dans la plaquette Vers de 1894, chez Ollendorf. Ils ont été repris dans De l’Angélus de l’aube à l’Angélus du soir en 1898 puis dans OPC, pp. 136-137
Ils avaient été reproduits en fac-similés dans le numéro de la revue Biblio de juillet 1950, en partie consacré à Francis Jammes.
Quant à la forme, ce sont les deux seuls sonnets réguliers dans De l’Angélus de l’aube à l’Angélus du soir. La plupart des vingt-huit alexandrins présentent un rythme ternaire, cher à Francis Jammes.
Quant au fond, il s’agit d’un poème d’amour. Dans le premier sonnet, l’amant parle tout bas à celle qu’il tient dans ses bras et qui dort dans un jardin. Dans le second sonnet, il s’interroge sur les rêves de la dormeuse. La chaleur − « tropicale » − qui règne sur cet avatar du jardin d’Éden (sans parler du vers inaugural), fait que l’on finit par se poser des questions sur la candeur de la jeune fille
Est-elle si endormie que ça ? Chacun jugera en lisant le second des deux sonnets :
Ton rêve est si doux – si doux qu’il fait bouger tes lèvres
tout doucement, tout doucement – comme un baiser…
dis, rêves-tu que sur un roc vont se poser
parmi des thyms chèvrefeuilles de blanches chèvres ?
Dis, rêves-tu que sur la mousse, en notes mièvres,
la source pure au fond du bois vient à jaser.
– ou qu’un oiseau tout rose et bleu s’en va briser
Les fils de Vierge et faire au loin s’enfuir les lièvres ?
Rêves-tu que la lune est un hortensia ?...
– ou bien encor que sur le puits l’acacia
jette des fleurs de neige d’or sentant la myrrhe ?
– ou que ta bouche, au fond du seau, si bien se mire,
que je la prends pour une fleur qu’un coup de vent
a fait tomber, du vieux rosier, dans l’eau d’argent ?
Le premier sonnet a été mis en musique par Louis Durey (1888-1979), membre du Groupe des Six, et chanté par le ténor Philippe Pistole.
Jacques Le Gall