Ms231 (Orthez)

Prière pour pardonner une offense (1898)

Manuscrit autographe (1f. ; dim : 25 x 19,5), non signé, non daté [27 août 1898]. Encre. Complet. Acquisition Joassin.

Dans son Francis Jammes. Sa vie son œuvre (Paris, Mercure de France, 1961), Robert Mallet donne la liste de huit "Prières" inédites faisant partie de la collection Jean Labbé : on pourra les lire dans un manuscrit conservé à Pau (P : Ms 452/14). Le manuscrit d’une neuvième "Prière" est conservé à Orthez. Son titre : « Prière pour pardonner une offense ». Première publication dans OPC, 1995, tome II, 574-575. Reprise dans OPC, 2006, pp. 1371-1372.

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PRIÈRE POUR PARDONNER UNE OFFENSE

Je regarde en mon cœur et j’ai peur de la haine.
Mon Dieu, apaisez-moi. Faites que je pardonne.
Voyez que tout est calme au loin et que l’automne
pacifiera bientôt l’horizon de la plaine.

Au nom de ceux qui jamais ne me firent de mal ;
au nom des animaux, des plantes et des pierres,
par la colline grave et la forêt sévère,
éloignez la vengeance amère de mon âme.

Oui, je veux pardonner. Oui, si tu étais là,
toi qui as menti, je te pardonnerai encore
si tu mentais. Regarde ? Il y a des fumées d’or
qui baisent les coteaux attristés, doux et calmes.

Que serons-nous, dis-moi, amie de mon ami,
quand les mêmes maïs mûriront sur la terre ?
Nos corps seront rendus à la cendre légère.
Il ne restera rien du mensonge endormi.

Si ta chair refleurit parmi les nielles bleues,
et si, par le déclin d’un triste crépuscule,
un de ces vents d’été plus doux qu’un chant de flûte
passe en pleurant sur toi, ô pauvre douloureuse…

Dis-toi que mon pardon chante encore dans le vent.
Qu’il passe, sans meurtrir l’âme de ta corolle,
et qu’il emporte et lave et délie tes paroles
comme les grains de blé qu’il sème dans le champ.

 

Jacques Le Gall