Manuscrit autographe (8 ff. ; dim : 27 x 21), non daté, non signé, passablement raturé, au crayon, suivi du tapuscrit (6 ff. ; mêmes dimensions). Le tout provient du fonds Jean Labbé. Reliure violette.
Un texte semble-t-il inédit et à coup sûr étrange, dans cette veine caustique (voire potachique) où Jammes peut exceller.
Chaque page est en effet divisée en deux colonnes parallèles : à gauche, un tableau de la vie parisienne, chez A. F. [Arthur Fontaine], ou chez F. Masson (15 rue de la Baume), ou chez Adrienne Monnier (avec Claudel et son neveu), au lendemain de la guerre ; à droite, un tableau bien différent, à Hasparren, chez « Moi », « À l’église », sur la cancha (pour la partie de pelote), le jour de la sainte Jeanne d’Arc 1929. Le peu commun dénominateur n’est autre que « Moi », autrement dit Francis Jammes en personne.
À gauche, Adrienne Monnier fait savoir à « Moi » que Jacqueline, la fille d’A. F., le convie à une audition de La Mort de Socrate par Érik Satie lui-même. Avant de s’y rendre, le candidat à l’Académie française rencontre F. Masson (secrétaire perpétuel de ladite Académie), Hymans (ministre belge) et Ségnobos (muet comme une carpe). L’audition, « lugubre », est précédée d’une rencontre avec le neveu de Claudel et s’accompagne de l’évanouissement d’un « ultra-surréaliste ». La partie se termine dans les applaudissements.
À droite, « Moi » est chez lui et achète trois kilos d’anguilles à Bordachoury. Il se rend ensuite à l’église où il parle avec son ami Salagoïty. Au déjeuner, on mange avec appétit les anguilles tout en continuant de parler des uns et des autres, de Léon Bérard et Jean Ybarnegaray en particulier. Une jeune fille interrompt ces agapes et avoue deux enfants naturels qu’elle aimerait confier à « Moi ». Ce dernier renvoie l’affaire au lendemain et assiste à la partie de pelote qui oppose Ustaritz et Hasparren : « Oh ! Qu’il fait beau ! », sous le ciel basque.
Jacques Le Gall