Né à Bruxelles 8 septembre 1876, décédé le 11 septembre 1961 à Ixelles, Thomas Braun fut à la fois écrivain et avocat. Il fut aussi secrétaire de rédaction, à partir de 1898, de la revue Le Spectateur catholique. Fondée en juillet 1897 par des écrivains belges, cette revue à laquelle Francis Jammes collabora s’éteignit trois ans plus tard. Outre des ouvrages juridiques, en particulier sur les brevets d'invention et la contrefaçon industrielle, Thomas Braun est l’auteur de nombreux écrits regroupés dans deux anthologies principales. Publiée au Mercure de France en 1950, une première anthologie intitulée Poésie 1898-1948, regroupe les principaux recueils de ce poète belge : L'an ; Le livre des bénédictions ; Philatélie ; Fumée d'Ardenne ; Prières ; À des absents ; Occasions et solennités. Une seconde anthologie, posthume, due à Frédéric Kiesel, élargit le choix des textes de Thomas Braun à la prose : Fumée d'Ardenne, poèmes et prose, Éd. Duculot, Paris-Gembloux, 1985.
Dès la parution de De l’Angélus de l’Aube à l’Angélus du Soir, Thomas Braun écrivit un article élogieux dans la revue bruxelloise Durandal. Au printemps 1899, il profita d’un pèlerinage à Lourdes pour faire le détour par Orthez et rendre visite à Jammes de qui il resta un ami fidèle. Au printemps 1900, il invita le poète en pleine dépression à faire des conférences en Belgique (d’abord à Bruxelles puis Anvers, au pays de Max Elskamp, cette « âme de Flandre et d’En Haut »). Après avoir rencontré ses amis à Paris (il y fit aussi la connaissance d’Odilon Redon et de Claude Debussy), Jammes arriva à Bruxelles et fut cordialement reçu par son ami.
La conférence eut lieu le 17 mars, devant six cents personnes dont André Gide. Elle avait pour sujet la simplicité et pour titre : « Les Poètes contre la Littérature » (O : Ms R6). En résumé, elle condamnait la poésie cérébrale, les artifices de la poétisation, du symbolisme et du naturisme. Elle s’en prenait, sans citer de noms, à l’école de Saint-Georges de Bouhélier (que Jammes accusait de forcer « les légumes de son jardin »), aux sophistications de René Ghil ou de Gustave Kahn, tout en sauvegardant (et c’était sincère) la poésie de Mallarmé. A contrario, elle citait en exemple nombre de poètes amis ainsi que le poète chinois Khiang-Loung. Le succès fut au rendez-vous bien que Jammes n’eût jamais parlé en public. Les moments qui précédèrent cette conférence furent quant à eux tragi-comiques : victime d’une extinction de voix, le conférencier ne put délivrer son message (« sans une hésitation » et « avec un timbre si éclatant qu’il eût rendu jaloux le fils de Pasiphaé ») que grâce à l’aconit préconisé par… Gide. On lira là-dessus Les Caprices du poète, pp. 70-74. C’est à la suite de ces deux conférences que Jammes se rendit à Bruges puis à Amsterdam, son voyage le plus septentrional (pièce du P : Ms 452).
Francis Jammes lui a dédié le poème intitulé « Bruges » qui fait suite à « Amsterdam » dans Le Deuil des primevères (OPC, p. 314 ; le manuscrit de "Amsterdam" est conservé à la Bibliothèque Patrimoniale de Pau sous la cote Ms 452/20).
Les relations Jammes-Braun se poursuivirent par des écrits ou des rencontres. Thomas Braun publia Des poètes simples, Francis Jammes aux Éditions La libre esthétique, Bruxelles, en 1900 et Propos d’Hier et d’Aujourd’hui aux Éditions Van Oest, Bruxelles, en 1908. Il se rendit aussi à Bucy-le-Long le 31 décembre 1907. Sur invitation de Thomas Braun, Jammes donna une nouvelle conférence intitulée « Le Poète » au Cercle artistique de Bruxelles le 25 novembre 1921, peu après son installation définitive à Hasparren. Il se rendit de nouveau en Belgique quelques mois plus tard, en juin 1922, après avoir assisté à « La Semaine des Écrivains catholiques » qu’il clôtura par un discours très applaudi.
La médiathèque Jean-Louis Curtis d’Orthez possède le manuscrit du poème que Jammes écrivit en septembre 1899 pour fêter les fiançailles de son ami. [O : Ms 180] Ces dix vers figuraient dans la Correspondance de Francis Jammes avec Thomas Braun, introduction et notes de Benoît Braun, Palais des Académies, Bruxelles, 1972. Ils ont été repris dans l'Œuvre Poétique Complète (OPC, p. 1381).
Reliure de Des poètes simples, Francis Jammes réalisée à la demande de Thomas Braun :
plein maroquin poli vert incrusté d’une plaque de cuir repoussé, peint en rouge et vert,
représentant la maison Chrestia, jaquette de maroquin vert à long grain (Collection particulière).
Des poètes simples, Francis Jammes. Exemplaire sur papier de Japon
avec un envoi de l’auteur à Mlle Geneviève Goedorp,
la jeune et récente fiancée de Francis Jammes. Octobre 1907, Bruxelles. (Collection particulière).
En 1932, Thomas Braun invita Francis Jammes en Belgique, chez lui, à Maissin. Un film en porte témoignage. Ce film est bref, mais précieux. On peut y voir le vieux poète tel qu’en lui-même, parmi, de tous âges, ses amis belges :
Bibliographie : Correspondance de Francis Jammes avec Thomas Braun. Introduction et notes de Benoît Braun, Bruxelles, Palais des Académies, 1972.
Jacques Le Gall