Manuscrit autographe (4 ff. ; dim : 27 x 21), non signé, sans date (mais vraisemblablement écrit au cours du second semestre 1937). Encre. Titre au crayon rouge de la main de l’auteur. Ce manuscrit partiel s’accompagne d’une transcription complète (10 pages) par Bernadette Jammes. Cette transcription comporte plusieurs corrections autographes de Francis Jammes mais n’a pas été numérisée. Entièrement consacré à Georges-Clément de Swiecinski, le Bulletin de l’Association Francis Jammes n° 11 (juin 1988) a publié ce texte (pp. 46-50) jusqu’alors inédit.
Dans « Swiecinski», Jammes laisse largement la parole au sculpteur dont les trois grands parti pris furent : l’emploi de la taille directe de la pierre (car ce « n’est point du dehors, mais du dedans que vient le génie ») ; l’application raisonnée et personnelle de la polychromie (car il est triste de « voir périr les plus belles statues sous l’action simultanée du soleil, de la poussière, de l’humidité ») ; un hiératisme qui « n’exclut pas le mouvement mais qu’il arrête au moment précis de sa courbe lorsque celle-ci répond exactement à ce que la vie du sujet exige ».
Sur « Swick », ainsi qu’il l’appelait parfois, Francis Jammes a aussi écrit un autre texte qui parut dans Le Figaro du 13 octobre 1933 et qui fut repris dans Variations dans un air français (pp. 105-108) : « Le Sculpteur et la Mer » (P : Ms 530). Il y est bien sûr question du buste en terre cuite que l’ancien médecin réalisa, à Hasparren, en juillet 1930. Ce buste (H : 0,73 ; L : 0,33 ; Ép. : 0,33) fut acquis par l’État qui le déposa au Musée des Beaux-Arts de Pau. Deux répliques en bronze en ont été exécutées : l’une se trouve au Musée Basque, à Bayonne, l’autre a été offerte à l’Association Francis Jammes par Marie Jammes, la troisième fille du poète, en 1983.
À travers ce buste, Jammes se voyait en « poète rustique, rejoignant la plus
belle antiquité par son regard perdu dans l’infini, sa face en proie à la
tourmente, sa barbe tressée de capillaires arrachées au rempart troyen »
Après un premier séjour à Guéthary (il y avait moulé le masque mortuaire de Toulet en 1920), Swiecinski s’installa villa Lekautz-Baïta (« Lieu froid », en basque) sur la falaise face à l’Océan, en 1922. Francis Jammes se dépensa sans compter pour faire connaître le sculpteur. Il le parraina à la Société des Sciences, Lettres et Arts de Bayonne, le recommanda au Commandant William Boissel, fondateur et directeur du Musée Basque, le présenta à Frédéric-Arthur Chassériau et à tous les artistes qu’il connaissait : Ramiro Arrue, Pablo Tillac, José de la Peña… Mais les dernières années de Swiecinski ne furent pas heureuses : vandalisation des céramiques de sa villa de Guéthary, litige avec la municipalité de Cambo (autour de la célébration d’Edmond Rostand), dislocation de Lekautz-Baïta lors des pluies torrentielles du 20 septembre 1959, perte des bénéfices du brevet déposé des « tuiles Clément »… C’est la Ville de Guéthary qui dut se charger des obsèques de Swiecinski.
Dès 1948, donc dix ans avant sa mort, le sculpteur avait donné au Musée Basque de Bayonne les bustes de Lesca, Loti, Rostand, Toulet. Deux ans plus tard, il léguera ce qui restait de ses œuvres (ainsi que sa correspondance) à la commune de Guéthary. Ce musée sera installé en 1958 dans la somptueuse villa Saraleguinea (bâtie par un « Américain » de souche basque, M. Hypolyte Lesca), puis laissé à l’abandon et rouvert en 1985. C’est là que l’on peut encore voir ce qui a été sauvé du travail de celui dont Jammes avait comparé l’atelier à « un coquillage irisé et chantant ».
Bibliographie : Bulletin de l’Association Francis Jammes, n° 11, juin 1988.
Jacques Le Gall