Ms 452/02 (Pau)

Dandy (1891)

Le manuscrit autographe (1 f. ; dim : 16,5 x 17) de ce poème, signé, non daté, a été acquis chez Jean Loize en mars 1954. Difficilement classable. L’écriture, très ancienne, et le paraphe permettent de le dater de 1891.

Ms452/02 (Pau)

Dandy

Tout enfant il rêvait d’une boîte de fil
qu’il avait entrevue un jour chez la comtesses :
Un indien avec un soleil sur la fesse
gauche et que regardait un serpent de profil.

Superbement campé, d’un tout nu sans coutil,
ce sauvage tirait de l’arc avec adresse
– Si bien, qu’il envoyait tout juste à son adresse,
la flèche dans l’œil droit du grand python subtil.

Et cet enfant rêveur qui se curait les ongles,
dandy futur, était scandalisé de voir
l’anthropophage nu montrant son cul aux djungles !

– Mon père, pensait-il, se met en habit noir –
Et quand il fut plus grand, ce Dandy, sur l‘échine
de cet indien mit un peu d’encre de Chine.

Il existe – toujours sous la forme d’un sonnet − une autre version de ce poème. Jammes adressa cette seconde version à son ami Amaury de Cazanove, le châtelain de Salles, à Sallespisse, village voisin d’Orthez. Elle a été reproduite en fac-similé dans la plaquette Notre ami Francis Jammes, "La Source Cazanove", Pau, 1984. Avant d’être reprise dans OPC, pp. 1345-1346

Trois différences entre les deux versions : le titre (« Dandy » ou « Dandysme ») ; le premier vers (une inversion) ; les épigraphes de la seconde version (empruntées à Barbey d’Aurevilly, Lamartine et… Homais)

Cette dernière épigraphe (« L’homme sentit germer les arsenics futurs ») annonce la tonalité − passablement ironique, voire rimbaldienne − du poème : si le Dandy « plus âgé » macule l’image entrevue d’une boîte de fil, le personnage d’Homais ne passe pas pour avoir inventé le fil à couper le beurre.

Ce poème – il semble contemporain du poème « À Arthur Rimbaud » (O : Ms 8b) – a été recueilli dans l’ouvrage posthume : Prends nos vieux souvenirs (Éditions de l’Ancre d’Or, 1948).

 

Jacques Le Gall